Tibétains et Occidentaux : pourquoi la rencontre avec le Vajrayana n’a pas la même facilité ?

Questions-Réponses

LES  TIBETAINS ET LE VAJRAYANA

Avant d’aborder la différence entre les Tibétains et les Occidentaux dans leur manière de rencontrer le Vajrayana, il est important de clarifier un point essentiel : le Vajrayana n’appartient pas aux Tibétains.

Le Vajrayana est un enseignement du Bouddha valable pour tous les êtres, quelles que soient leur culture, leur origine ou leur époque. Il n’est pas « tibétain » par essence, mais il s’est déployé au Tibet d’une manière particulièrement profonde et complète.

Depuis plus d’un millénaire, le Tibet « le pays des neiges  » a été un réceptacle karmique exceptionnel pour ces enseignements.

Les maîtres indiens ont trouvé là un terrain humain et culturel où :

  • la foi
  • la dévotion,
  • la discipline,
  • le courage,
  • et la stabilité,

ont permis au Vajrayana de véritablement s’installer, de fleurir et de se transmettre de génération en génération sans interruption.

Ainsi, lorsque nous parlons des « Tibétains », il ne s’agit pas d’attribuer le Vajrayana à une ethnie particulière, mais de constater que ce peuple a été, pendant des siècles, le support parfait pour préserver, pratiquer et incarner ces enseignements très subtils.

Le Vajrayana n’est pas limité aux Tibétains. Mais les Tibétains ont développé, collectivement, le karma, la culture, les habitudes mentales et les valeurs qui ont permis à cette voie d’être vivante, stable et profondément enracinée.

    C’est cette différence de structure intérieure  et non une différence de valeur qui explique pourquoi Tibétains et Occidentaux rencontrent le Dharma de manière si différente.

     UNE CONSTRUCTION IMPREGNEE DU DHARMA

    Les Tibétains grandissent dans un univers où le Dharma est partout : dans la maison, dans les valeurs familiales, dans l’environnement social, dans la manière même d’aborder la souffrance.

    Ils ne “deviennent” pas bouddhistes : ils naissent dans un tissu bouddhiste transmis depuis des générations.

    Avant même de comprendre les enseignements, ils baignent naturellement dans :

    • la foi en les Trois Joyaux,
    • la confiance dans le maître spirituel,
    • les pratiques quotidiennes (offrandes, circumambulations, récitations…),
    • l’idée que la pratique est la réponse naturelle à la souffrance,
    • les valeurs du Dharma appliquées à la vie de tous les jours.

    Le Dharma n’est pas un concept intellectuel : c’est la manière spontanée de voir la vie.

    Une stabilité émotionnelle façonnée par le Dharma

    Bien sûr, les Tibétains ne sont pas des bouddhas : ils ont leurs émotions, leur caractère et leurs défauts comme tout le monde.

    Mais globalement, leur construction psychologique s’est faite :

    • dans un environnement religieux stable,
    • auprès de parents façonnés par le Dharma,
    • avec une vision de l’existence alignée avec la vue bouddhiste (samsara = souffrance),
    • avec l’habitude d’associer spontanément les difficultés à la pratique.

    Quand une épreuve survient, maladie, accident, mort d’un enfant, leur vue du Dharma ne vacille pas.

    Au contraire, la souffrance :

    • renforce le refuge,
    • renforce la foi,
    • renforce la confiance et la reliance au maître.

    La douleur devient un rappel de l’impermanence et de la véracité du Dharma, pas une raison d’abandonner la voie.

     UNE CONSTRUCTION INTERIEURE FRAGILE

    À l’opposé, les Occidentaux rencontrent le Dharma souvent adultes : à 20, 30, 40 ans ou plus. Très rarement dans une famille bouddhiste depuis plusieurs générations.

    Même lorsque les parents sont “bouddhistes”, il s’agit de bouddhistes récents, eux-mêmes en recherche et souvent instables dans la vue.

    Ainsi, l’Occidental arrive au Dharma après s’être construit :

    • dans une famille plus ou moins stable,
    • avec des modèles parentaux parfois violents, alcooliques, anxieux, absents ou dépendants,
    • avec des divorces, des conflits,
    • avec des traumas, des abus, des humiliations,
    • avec un manque de sécurité affective,
    • avec une vision matérialiste, psychologisante ou individualiste du monde.

    Souvent, la structure intérieure est fragile. Ce n’est pas un jugement mais un constat. Et ce constat éclaire beaucoup de difficultés rencontrées sur la voie.

     DEUX ENTREES DANS LE DHARMA

    Chez les Tibétains, le Dharma pénètre facilement car la terre intérieure est déjà prête.ez les Occidentaux, bien que chaque entrée soit unique, elle est souvent motivée par :

    • ce qu’ils croient,
    • ce qu’ils croient,
    • ce qu’ils vivent,
    • ce qu’ils ont reçu,
    • ce qu’ils voient autour d’eux.

    Même la souffrance nourrit la pratique.

    Chez les Occidentaux, bien que chaque entrée soit unique, elle est souvent motivée par :

    • une souffrance psychologique,
    • un échec existentiel,
    • une quête de sens,
    • ou parfois une fascination culturelle.

    Mais tous arrivent avec la même réalité : un Dharma qui doit s’installer sur une construction intérieure déjà formée et souvent instable.

     UN ACCES SURTOUT INTELLECTUEL

    En Occident, la découverte du Dharma se fait presque toujours par :

    • des livres,
    • des enseignants eux-mêmes encore sur la voie,
    • des vidéos,
    • des conférences ponctuelles.
    Très peu d’Occidentaux ont la possibilité de vivre des années auprès d’un maître spirituel, comme l’ont fait quelques figures exceptionnelles telles que Matthieu Ricard.

    Une compréhension intellectuelle, mais rarement incarnée.

    Le Vajrayana ne se transmet pas d’abord par les mots : il se transmet par la relation vivante avec un maître, par l’exemple et par la transmission directe.

    Pourtant, l’Occidental commence souvent par lire :

    • le Dzogchen,
    • le Mahamoudra,
    • des traités très élevés.

    Ces enseignements sont destinés à des disciples ayant déjà une base solide dans :

    • le refuge,
    • l’esprit d’éveil,
    • le renoncement,
    • la stabilité intérieure,
    • la purification,
    • la dévotion au maître.

    Résultat : on se forge une idée du Dharma, mais pas encore une expérience du Dharma.

    Et souvent, on commence par le toit avant d’avoir construit les fondations.

     QUAND LES TRAUMAS SE GREFFENT SUR LA VOIE

    Là où le Dharma tibétain s’enracine dans une structure stable, le Dharma occidental doit s’installer dans une structure parfois :

    • fragile,
    • traumatisée,
    • peu sécurisée,
    • peu familière de la notion de maître,
    • pleine de projections issues de l’enfance.

    Quand la vie frappe fort, le Dharma ne tient pas, beaucoup d’Occidentaux pratiquent sincèrement, mais lorsque surviennent :

    • la maladie,
    • la perte d’un proche,
    • un divorce,
    • la mort d’un enfant,.

    La pratique vacille. Non pas parce que le Dharma est faible, mais parce qu’il n’a pas encore pénétré en profondeur. Le Vajrayana se mélange alors aux traumas.

    Par exemple :

    • la relation au maître est teintée de blessures d’abandon ou de rejet,
    • la pratique devient agitée ou superficielle,
    • la foi s’effondre au moindre choc,
    • les émotions prennent le dessus sur la vue juste.

    Le Dharma ne peut pas tenir, quand toute la structure psychologique se met à trembler.

    POURQUOI LES TIBETAINS TIENNENT , LES OCCIDENTAUX VACILLENT

    Chez les Tibétains, la construction psychologique, l’environnement culturel et la vision du Dharma sont alignés.

    Chez les Occidentaux, la construction psychologique et la vision du Dharma sont en conflit. Le Dharma arrive tard, comme une greffe, mais le tronc a été façonné autrement.

     UNE VOIE PLUS DIFFICILE POUR LES OCCIDENTAUX

    Ce n’est pas un manque de foi.

    Ce n’est pas un défaut

    C’est simplement le résultat d’une structure intérieure très différente.

    Pour un Tibétain : le Dharma est une prolongation naturelle de sa construction.

    Pour un Occidental : le Dharma est une révolution intérieure, qui doit se frayer un chemin à travers des blessures, des traumas et une vision du monde totalement différente.

    Cela demande :

    • du temps,
    • de la patience,
    • parfois une thérapie,
    • une guidance juste,
    • beaucoup de bienveillance envers soi-même.

    Ce constat n’est pas pessimiste. Il éclaire pourquoi le chemin est parfois complexe, et pourquoi il peut devenir  malgré les obstacles l’un des parcours les plus sincères, les plus profonds et les plus transformateurs.

    Livres essentiels

    Découvrez les livres essentiels du Bouddhisme. Une sélection de nos ouvrages favoris pour les adhérents et pratiquants bouddhistes.

    Compassion et végétarisme

    Dans le bouddhisme tibétain, le végétarisme est une question de compassion et de conscience profonde de la souffrance des êtres sensibles.

    Les samaya

    Le vajrayana, comme le hinayana et le mahayana, implique des vœux : les samaya, des engagements sacrés liés principalement aux initiations.

    La prise de refuge

    Prendre des voeux de refuge implique un engagement profond de ne plus nuire aux êtres et d’accomplir continuellement leur bienfait.

    Refuge et vegetarisme

    Comment s’articulent la prise de refuge et le végétarisme lorsque l’on décide de s’engager sur la voie Bouddhiste ?

    Le maître spirituel

    Le rôle du maître spirituel dans le Vajrayana est d’une importance capitale; mais il est essentiel de bien comprendre la nature de ce lien.

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